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L'enquête et la santé 

La théorie de l’enquête de John Dewey a pour but de résoudre des problématiques, ouvertes, sans solution connues au préalable et insérées dans la vie réelle. Le but de cette théorie est de passer d’un ressenti négatif à un ressenti positif en trouvant des solutions pragmatiques. Cette démarche se réalise en 3 phases. La première est de repérer ce trouble, cette insatisfaction et de rechercher à en formuler une problématique, une question ouverte, en passant de l’émotion à la réflexion. Une fois cette problématique formulée, la seconde phase consiste à envisager un certain nombre de solutions qui pourrait répondre à cette question initiale, de choisir celle qui serait la plus adaptée et ensuite d’établir un plan d’action pour l’appliquer. Enfin la dernière phase est la mise en œuvre de la solution choisie et d’en faire un retour sur son vécu et d’en tirer des conséquences, qu’elles soient positives ou négatives. 


Ce processus est un apprentissage en cherchant à comprendre le lien entre les actions et leurs conséquences aboutissant à de nouvelles connaissances.  Cette théorie de l’enquête est basée également sur l’expérience qui se composent de 4 éléments inséparables, interdépendantes et interactives : cognitive (interprétation mentale), affective (vécu émotionnel), conative (l’engagement) et corporelle (comportement). 
Pour illustrer cette théorie, je vais relater une expérience personnelle liée à ma propre santé. 

Loupe

La première phase est donc la perception d’un trouble, d’une insatisfaction, qui tient compte des émotions et des sensations corporelles. Pour ma part, ce trouble se produisit en Janvier et Février 2021, avec la sensation d’un mal-être intérieur, que je n’avais jamais éprouvé jusqu’à maintenant. Je pris en compte cette sensation. Je ne fermais pas les yeux sur ce moment désagréable, je ne cherchais pas à l’étouffer, j’écoutais mon corps. Avec l’aide de mon cahier de bord et de la psychologue, je la formalisais et je la nommais ce trouble. J’évoquais plus tard un phénomène de burn-out. 


Avant d’aller plus loin, il convient de présenter mon contexte personnel, propre à chacun.e, et un climat général particulier. Je suis en arrêt longue maladie depuis plus de 2 ans pour un cancer du thymus. Cependant, je n’avais pas perçu ce trouble jusqu’alors malgré la maladie qui ne m’empêche pas notamment de participer aux soins de support lié au cancer. Mon autre activité principale porte sur l’écriture d’une thèse en Sciences de l’Education. Le contexte général voir mondial fait que nous vivons dans une période où le virus, la Covid 19, occupe une place importante dans nos vies et dans les médias, nous contraignant à vivre différemment qu’auparavant. On pourrait ajouter une météo hivernale, froide et pluvieuse. 


Ensuite, dans la première phase, il est nécessaire de trouver les causes de ce mal-être et qui s’avèrent de différentes natures. Tout d’abord, la cause principale semble concerner l’écriture de la thèse où je me suis imposée une échéance personnelle pour un rendu d’écrit, me mettant moi-même subitement une pression. J’étais focalisé sur cet objectif, m’interdisant de faire tout autre chose. J’ai voulu mettre sous couvert ma fatigabilité suite à la maladie et aux traitements, m’imposant de lire et d’écrire des journées entières. Je ne prenais pas le temps de me reposer, de récupérer, ce qui est normal dans le cas de cette maladie tout en m’ajoutant des contraintes de concentration et d’attention, devenues, d’ailleurs difficiles. L’effet n’a pas tardé avec un grand malaise intérieur qui apparut. Le fait d’avoir occulté cette fatigue chronique s’explique peut-être le souhait de retrouver une vie normale, comme celle d’avant, avec le même rythme. Cette expérience m’a rappelé ce que je savais déjà ….  Le contexte du Covid limite considérablement les interactions dans la vie réelle et multiplie les visioconférences, procurant parfois une solitude difficile à supporter. 


A la fin de cette première étape je formalisais donc une problématique, une question personnelle : comment me débarrasser de ce mal-être soudain ? Ou comment retrouver un état psychologique positif, essentiel au maintien de ma bonne santé générale (malgré la maladie) ? 

Anneau de Lightbulbs

Je passais donc à la seconde phase consistant à construire un plan d’action dont le but est de développer une nouvelle liberté d’action. 


Tout d’abord, j’ai décidé de ne pas respecter la date que je m’étais imposée et j’ai donc fait une pause en m’arrêtant quelques jours, suite d’ailleurs au conseil de la psychologue me suggérant de prendre des jours de vacances ! 


Ensuite, je décidais d’aller marcher à nouveau, m’autorisant à ressortir, à reprendre l’air même si parfois la météo n’y était pas toujours propice, avec toutefois de très belles journées qui m’a donné l’occasion d’aller sur Etretat et la Roche-Guyon. 


Ces deux expériences, très belles en émotion, m’ont montré que je devais prendre en compte mes propres soins de supports. En effet j’étais très participatif dans différentes activités telle que la sophrologie, l’art thérapie, le tango ou encore le jardin thérapeutique (je tiens d’ailleurs à remercier chaleureusement ces associations pour leur soutien). Or avec le virus, ces activités ont cessé et on peut bien le comprendre étant des personnes à risque. Et je me suis décidé alors de réaliser moi-même mes soins de supports et de ne pas attendre la « réouverture » des associations. Je me lançais à construire mes propres supports de sophrologie, tout en utilisant ceux disponibles sur internet.  Je me lançais dans l’aquarelle avec ma propre formation (livres et réseaux sociaux). Je décidais également de réaliser des sorties alliant culture et nature comme les deux sorties citées précédemment. La nature est accessible et gratuite. Je pus m’inscrire à un atelier de gymnastique adaptée (rare activité encore en présentiel), avec l’objectif de créer à nouveau des interactions (même distancées) et de prendre soin de mon corps. Dans le même objectif, avec un petit groupe de patients, nous décidâmes également d’organiser nous-mêmes nos randonnées dans la région.  

Forêt

La troisième phase correspond à la mise en œuvre d’une action. Comme on vient de le voir, ces actions ont été multiples et se sont réalisées presque qu’en même temps qu’elles ont été pensées. 


La dernière phase comporte également un retour sur l’expérience vécue pour repérer les conséquences de ses actions. Les effets furent rapides et positifs du fait de la multiplicité des actions et que je me suis m’y à retravailler sur ma thèse avec parcimonie et avec beaucoup de plaisir. Je reste très vigilant de ne pas retomber dans les travers précédents pouvant impacter ma santé de manière considérable. 


J’appris plusieurs choses (ce qui est un des buts de cette démarche). Je déduisis que je devais alterner mes activités pour garder un équilibre intérieur. J’appris aussi que je ne devais pas attendre les ressources venues d’ailleurs dans un contexte si particulier de couvre-feu et de fermetures des structures mais que je pouvais construire et organiser mon propre programme de soin adapté à cet environnement contraignant. 

Cascade naturelle

Cet exemple de vie n’est en aucun cas un modèle à suivre puisque c’est une problématique propre et des solutions proposées sont adaptées à ma situation et mon contexte. Cependant, cette expérience permet d’illustrer de manière concrète ce processus en trois étapes. 

Jean-Emmanuel Maigret

(Mars 2021)

BILBLIOGRAPHIE 

Pour la théorie de l’enquête : 

    Bourgeois Étienne (2013), Expérience et apprentissage. La contribution de John Dewey, in        Luc Albarello et al., Expérience, activité, apprentissage, Presses Universitaires de France, «        Formation et pratiques professionnelles », pages 13 à 38. 
    Dewey, John (1920), Reconstruction in Phylisophy, MV, Vol. 13). 
    Dewey, John (1938), Logic. The Theory of Inquiry. LW, Vol. 12.  
    Zask, Joëlle (2015), Introduction à John Dewey, Editions La Découverte. 

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